Sophie Taillé-Polian et Benjamin Lucas ont écrit au Premier ministre suite aux révélations de Mediapart sur l’implication du ministère de l’Intérieur dans le déferlement de mensonges et d’injures qui ont visé Trappes et son Maire Ali Rabeh.
Nous vous invitons à prendre connaissance de ce courrier et à le relayer massivement pour dénoncer ce scandale d’État.
Monsieur le Premier ministre,
Mediapart a publié ce jour un article intitulé « Trappes : un conseiller de Marlène Schiappa à la manœuvre » rapportant qu’un collaborateur direct de la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, aurait eu un rôle important dans l’alimentation de cette polémique qui a atteint à l’honneur, sur la base d’allégations mensongères, de la ville de Trappes, celle de ses habitants et de celle de son maire Ali Rabeh, adhérent de Génération.s.
L’article rapporte que Thomas Urdy, collaborateur et référent Laïcité du cabinet de Mme Schiappa “était ainsi en lien direct avec le professeur de philosophie”, Monsieur Dider Lemaire, avant que ce dernier ne multiplie les interventions médiatiques pour dénoncer une prétendue emprise islamiste sur la ville, allant jusqu’à énnoncer de nombreuses contres vérités :
- Les menaces de mort de la part d’habitants de Trappes et de ses élèves, sur lesquelles il s’est finalement rétracté.
- L’absence de salon de coiffure mixte dans la ville alors qu’il en existe plusieurs, dont un à quelques dizaines de mètres du lycée où exerce le professeur de philosophie.
- Le refus des élèves de la ville de participer à des chorales scolaires au nom de leur religion alors qu’elles y sont monnaie courante.
- Le caractère antisémite de l’incendie de la synagogue de Trappes d’octobre 2000 dont le caractère accidentel a été prouvé par l’enquête de police.
- L’attitude d’Ali Rabeh qui aurait accusé le professeur de “racisme” et “d’islamophobie” lors d’un reportage de la télévision néerlandaise Nieuwsuur. Allégations que la chaîne de télévision a démenties par communiqué.
Face à l’emballement médiatique et à la multiplication des accusations mensongères de familiarité avec des mouvances intégristes à l’attention du maire de la ville, dont vous saviez pertinemment qu’elles étaient fausses comme en témoigne la déclaration du Préfet des Yvelines à la presse qualifiant de “totale” la coopération d’Ali Rabeh avec les services de l’Etat luttant contre la radicalisation et les processus d’embrigadement sectaire, le lourd silence du gouvernement face à ce lynchage médiatique entâche le caractère républicain de votre action. Le président de la République qui avait accouru aux chevets du polémiste Eric Zemmour à son agression a brillé par son silence, malgré la “passion, presque une obsession, pour ce qui se passe à Trappes” que lui attribue l’un de ses proches dans l’article de Mediapart.
La seule réaction notable du gouvernement est venue du ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer, colportant lui-même de fausses informations, affirmant qu’Ali Rabeh serait coupable d’une “intrusion” dans le lycée du professeur de philosophie afin d’y distribuer un “tract”. Ces allégations, également fausses, n’ont fait que jeter de l’huile sur le feu. Ali Rabeh s’est rendu au lycée de la Plaine-de-Neauphle accompagné du proviseur du lycée et des équipes éducatives pour y initier un dialogue avec les élèves sous le feu médiatique. Ses adjoints ont distribué une lettre à l’extérieur du lycée appelant à la concorde et à la prise de recul sur les événements.
Depuis l’irruption de cette polémique, le maire de Trappes, Ali Rabeh, est placé sous un régime de protection policière, il a fait l’objet d’une vague de harcèlement, de saillies racistes à de menaces de morts détaillées, signalées par la plateforme Pharos. Au-delà de l’honneur d’une ville, de ses habitants, de son maire, c’est l’édifice démocratique et le travail de centaines d’acteurs locaux pour construire une identité commune et républicaine dans ce quartier populaire qui sont menacés par de telles pratiques fondées sur des faits alternatifs, dignes des équipes de l’ancien Président Trump.
L’implication d’un proche conseiller de la ministre déléguée qui, selon Mediapart, serait pressenti comme candidat La République En Marche aux élections municipales de Trappes en cas d’annulation des élections, mais tout autant le silence coupable du président de la République, ou pire encore, les piques du ministre de l’Education Nationale : tout laisse à croire que le gouvernement était bien au courant de la situation et a préféré ne rien dire, voire, a préféré ajouter de l’huile sur le feu au pour arranger de vils calculs politiciens.
Nous exigeons des réponses de votre part : de quel niveau de connaissance disposaient Monsieur Darmanin et Madame Schiappa, en tant que ministre de l’Intérieur et ministre déléguée, de l’action de ce conseiller ministériel ? Le gouvernement a-t-il agit en coulisse pour porter atteinte à un élu de la gauche écologiste à quelques mois d’élections locales importantes, et à la veille d’une élection présidentielle dans laquelle vous essayez d’imposer une nouvelle querelle identitaire ? Quelles sanctions seront prises à l’encontre de ce conseiller censé être serviteur de l’Etat, qui est aujourd’hui responsable d’avoir transformé un ministère aussi prestigieux et essentiel dans la vie de la République en une officine de désinformation et de déstabilisation dirigée contre une collectivité locale ? En tant que coordinateurs nationaux de Génération-s et sénatrice du Val-de-Marne, nous demandons à être reçus pour obtenir des réponses à nos interrogations.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de notre profonde considération.
Sophie Taillé-Polian
Sénatrice
Coordinatrice Nationale de Génération.s
Benjamin Lucas
Coordinateur National de Génération.s
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