Dix ans de guerre en Syrie : un échec lamentable de la communauté internationale

Par Génération•s

Il y a dix ans, le peuple syrien se soulevait. A la suite de ses frères et sœurs arabes, il a revendiqué haut et fort son désir de liberté, de dignité et de justice. Du nord au sud, de Deraa à Alep en passant par Homs et Damas, des foules en liesse, avec enthousiasme mais non sans crainte, manifestèrent pacifiquement pour pouvoir enfin être entendus et considérés comme des citoyen.ne.s à part entière, sans différences de religion ni de genre.

Sourd à ces revendications, le tyran Bachar El-Assad a abattu la foudre sur la population, entraînant le pays dans le cycle infernal d’une guerre insurrectionnelle et d’une répression sauvage qui ont tué au moins 400 000 hommes, femmes et enfants, fait des millions de blessés et poussé 12 millions de Syriens à l’exil dans les pays voisins ou sur les routes d’Europe. Ensuite, le conflit s’est régionalisé et internationalisé avec les interventions turque, russe et iranienne, notamment par l’entremise du Hezbollah libanais chiite. Des monarchies du Golfe, appuyant de leur côté certains groupes rebelles sunnites, ont facilité la montée en puissance de Daesh et l’implantation d’un pseudo Etat islamique en Syrie et en Irak avec toute l’horreur qui en a découlé jusqu’en France et en Europe.

Dix ans plus tard, les ravages du désastre syrien sont encore présents. La guerre n’est pas terminée, une partie du territoire au Nord est occupée par la Turquie, l’enclave d’Idleb, tenue par des milices de diverses tendances dont des islamistes, résiste aux assauts de l’armée de Damas avec l’appui de mercenaires au service de Moscou, Israël bombarde les milices iraniennes pro-Assad tandis que Daesh est en train de se réorganiser à l’Est suite à sa défaite face à la coalition multinationale venue en appui aux FDS et aux forces kurdes du YPG réunies.

Quelles leçons tirer de ce terrible échec de la communauté internationale, incapable de ramener la paix et la justice dans cette région et de soutenir les revendications légitimes pour l’instauration d’un État démocratique en Syrie ? L’Europe et les États-Unis ont manqué en 2013 cette « fenêtre de tir » qui aurait permis aux insurgés démocrates de prendre le dessus sur Assad qui n’avait pas hésité à utiliser des armes chimiques sur sa propre population. La partie, maintenant, est bloquée. Les Occidentaux, et en particulier la France, n’ont plus leur mot à dire alors que le régime se maintient, soutenu à bout de bras par la Russie qui a obtenu en échange un meilleur accès à la Méditerranée. Plus déplorable encore, le sort du Rojava, région kurde autonome, trahie par l’Occident et abandonnée à elle-même, toujours sous la menace d’Ankara et de Damas.

L’urgence, aujourd’hui, est donc d’œuvrer pour mettre un terme aux ingérences étrangères, replacer l’ONU au centre du jeu, tout en portant assistance aux réfugiés où qu’ils se trouvent. Il convient aussi d’engager des poursuites contre tous ceux qui ont commis des crimes contre l’humanité, en particulier le président Bachar El-Assad et ses affidés. Car, avec ce dernier toujours au pouvoir, il n’y a aucun espoir que la Syrie retrouve un semblant de paix et d’unité et que les exilés veuillent revenir chez eux pour participer à ce long processus de guérison et de réconciliation.

La France ne doit pas accepter que Bachar El-Assad soit à nouveau reconnu comme le représentant légitime de son pays, toute élection, dans ce contexte, s’apparentant à une pantomime. Elle doit rejeter le fait accompli actuel qui n’ouvre aucune perspective d’avenir pour le peuple syrien. La France doit aussi se battre avec ses partenaires européens pour exiger de la Russie et de la Turquie le retrait de leurs troupes et maintenir la pression sur elles, notamment par des sanctions, pour qu’elles renoncent à leurs visées hégémoniques.
Enfin, Paris doit respecter ses promesses et protéger les régions autonomes kurdes et arabes de toutes les agressions extérieures.

Génération.s restera toujours solidaire du peuple syrien qui n’a rien demandé d’autre que la liberté et qui continuera encore à le faire.

Mouvement Génération.s / Comité International / Europe

2 commentaires

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François 17/03/2021 - 20:27

Merci de ce communiqué. Quelques remarques cependant : la France comme d autres pays européens et les EU interviennent aussi en Syrie. Demande t on leur retrait aussi. Heureusement que nous ne sommes pas intervenus en 2013 pour rentrer en guerre avec la Syrie…quelques bombardements n auraient certainement pas fait changer de politique Bachar El Assad…Si nous ne reconnaissons pas Bachar Al Assad comme interlocuteur avec qui négocier une paix durable? Pour les accords de Dayton comme pour mettre fin au conflit du Kosovo on a heureusement accepté de dialoguer avec Milosevic. Enfin etre solidaire du peuple syrien cela recouvre t il ceux qui combattent au sein de Daesh ou Al Quaida?

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    Bernard 17/03/2021 - 23:55

    Cher François,
    Les Européens et les Américains ne sont présents que dans une seule région au Nord et n’interviennent pas directement dans le conflit, contrairement à la Russie, la Turquie et l’Iran.
    En 2013, bombarder les sites stratégiques du régime l’auraient vite fait s’écrouler car il était et reste toujours détesté par l’énorme majorité de la population. En ex-Yougoslavie, suite aux bombardements de l’Otan, Milosevic, pourtant populaire, finit par céder et négocier pour se retrouver par la suite à la CPI. C’est tout ce qu’on peut souhaiter au sanguinaire El-Assad.

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